mercredi 16 mai 2012

11. Mon royaume pour des Moon Boots.

Période : Janvier 2006
Situation sentimentale : 1 amoureuse et 1 fille à Paris, trèèèèès amoureux.
Localisation géographique : Cambrousse morbihannaise (56).
Situation professionnelle : Pas l’ombre de la queue d’un job à l’horizon et juste le RMI pour vivre.

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Le moral était au top, suite à l’obtention du RMI qui me permettait d’être un aventurier semi-fauché, ce qui est toujours mieux qu’un aventurier fauché-tout-court-et-clodo-mort-sous-un-pont (C’est pas une fin très digne pour un aventurier – ni pour personne d’ailleurs), et suite à ma soirée TV devant R.I.S. police scientifique pendant laquelle j’avais bien rigolé (voir post précédent). On a les joies qu’on peut…

Les températures, elles, étaient par contre pas du tout au top (doux euphémisme). Ayant chaussé ma plus belle paire de moufles (et la seule d'ailleurs), j’avais donc commencé, pour m'occuper, à écrire un très bel ouvrage intitulé « Survivre en milieu hostile » (c’était assez difficile de taper à l’ordinateur avec des moufles, mais j’avais rencontré des défis bien plus rudes dans ma longue et périlleuse carrière d’aventurier). Le chapitre 1 s’intitulait (vous noterez comme c’était de circonstance) : « Vivre son hypothermie dans la joie et la bonne humeur », avec un préambule fort judicieux sur le dépistage de ladite hypothermie. Par exemple, si quand vous parlez dans votre maison ça fait de la fumée ou que vous dormez avec 2 doudounes en poils de yack et avec 5 paires de chaussettes (sur les pieds et sur les mains), ben y’a présomption d’hypothermie. Ou alors quand il y a des stalagtites dans votre feu (alors qu’il est allumé), ça c’est pas bon signe non plus… J’en étais là. L’hypothermie gagnait du terrain : il fallait que je réagisse.  

J’ai donc commencé l’écriture du deuxième chapitre de mon ouvrage intitulé, celui-ci, « Aimer les périodes glaciaires ». J’affûtais encore mes arguments, mais c’était encore très pauvre, soyons honnêtes… (Devant le succès prévisible de ce premier ouvrage, j’avais déjà réfléchi aux concepts de mes deux prochains livres : « Comment rigoler en famille de la perte de l’un de ses membres ? » (un des membres de son corps, pas un des membres de sa famille, hein) et « 235 recettes à base de sécrétions corporelles ». Important, ça, les sécrétions corporelles !). Mais bon, tout ça ne faisait pas vraiment avancer mon problème de congélation imminente (j’ai découvert à cette occasion combien il devait être difficile d’être un poisson pané). Je savais que c’était cool de jouer avec ses émotions (c’est le PMU qui le disait) et ça tombait bien pasque j’avais rien d’autre à l’époque. Mais j'ai vite dû me rendre à l'évidence que jouer avec mes émotions ne me chauffait pas des masses...

Quand soudain le salut vint de mes voisins les Lapins (voir post « un bon voisin est un voisin mort / PART II »), qui m’ont proposé de me dépanner en bûches pour une somme tout à fait raisonnable (en rapport avec mes ressources du moins, je n’ai pas fait d’étude de marché pour savoir si on pouvait choper du bois pour moins cher dans les environs et même si j’en avais eu l’envie, je n’aurais pas pu, je commençais à perdre mes doigts et il fallait que je récupère urgemment une source de chauffage).

Je leur ai donc pris une corde de bois. Une corde = 3 stères (on dit un stère by the way). Un stère = 1 m3 de bois. Voilà, vous êtes prêt pour vivre à la campagne maintenant. Par exemple, moi j’ai voulu faire mon crâneur, genre je suis un aventurier qui a trop bourlingué et on parle exactement le même langage gentil autochnone, alors j’ai dit « je voudrais 3 bonnes stères ». Et j’ai raté, donc.

C’est le fils Lapin qui m’a finalement livré le bois avec son tracteur. C’est fou comme les locaux sont habiles pour conduire des gros tracteurs dès l’âge de 15 ans… C’est tendu pourtant. Et est-ce bien légal d’ailleurs ? C’est fou aussi comme j’avais oublié à quel point l’adolescence est disgracieuse avec les garçons : on ressemble vraiment à un grand truc long, maigre et verdâtre, avec le nez et le front gras et des boutons rouges à pointes blanches partout sur la gueule (merci les hormones). C’est pas vraiment la meilleure période pour choper. Bien content d’avoir 28 ans (même si je rentabilise pas des masses ces temps-ci).

Problème principal de ces bûches salvatrices : elles étaient l’habitat naturel d’araignée assez moches (ô joie !). J’exultais. A la base, j’ai pas vraiment peur des araignées, je suis même pas contre en éclater une ou deux avec les mains (ça me fais plutôt rire quand elle pendouille de ma main accrochées seulement par leurs boyasses. C’est mon côté aventurier sadique : manger ou être mangé, éclater ou se faire piquer…). Mais bon, celles-ci étaient vraiment moches (et assez grosses, du coup on voyait très bien qu’elles étaient vraiment moches, même pas besoin de loupe). Pour remédier à cet épineux problème, j’avais trouvé une solution relativement efficace : je laissais mes bûches dehors pour que les araignées se noient un peu avec la pluie et après je les jettais dans le feu plus vite que l’éclair pour qu’elles meurent d’hydrocution. En général ça marchait bien, sinon, je les déssoudais à la pelle à feu. Peu – pour ne pas dire aucune – ont survécu.

Et j’ai les pieds au chaud maintenant. C’est cool. Même pas besoin de Moon Boots (ça tombe bien pasque ça coûte un bras ces merdes, et j'avais plus un rond suite à l'achat du bois).

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