mercredi 2 mai 2012

01. Un bon voisin est un voisin mort (PART I).



Période : Octobre 2005
Situation sentimentale : 1 amoureuse et 1 fille à Paris, option trèèèèès compliquée.
Localisation géographique : Cambrousse morbihannaise (56).
Situation professionnelle : Nada, pas l’ombre de la queue d’un job à l’horizon et juste mon solde de tous comptes pour vivre (puisque j’ai eu l’intelligence de démissionner).
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Après avoir démissionné de mon travail et quitté la capitale où j’ai toujours vécu, j’ai donc posé mes valises dans notre maison de vacances tout au fond de la campagne bretonne. Théoriquement, cela devait m’apporter tranquillité, sérénité et prise de recul. Ah, ah, c’était sans compter sans la vie et ses coups fourrés. Nouveau nuisible campagnard identifié (non prévu) : le voisin.

Mes voisins sont vraiment bizarres : certains sont bizarres drôles, certains sont bizarres flippants, la plupart sont les deux. J’ai changé les noms évidemment car je suis aventurier mais pas suicidaire et compte-tenu des caractéristiques de certains voisins, j’ai plutôt intérêt à ce qu’ils ne se reconnaissent pas.

Les voisins d’en face par exemple, Robert et Raymonde, une grosse cinquantaine, sont vieux et un peu énervés (et aigris aussi). Avant, y vivaient dans le Nord (et manifestement y préféraient, on se demande donc bien pourquoi il on choisit de venir vivre en Bretagne, en face de chez moi qui plus est). Ils sont relativement glaciaux à la première impression. Je les soupçonne d’être nés au Groenland et d’avoir été élevés par des ours polaires (rapport à l’amabilité)… Mais bon, à la rigueur, on est pas tous forcés d’être des joyeux drilles ! (Et là, pour le coup, c’était pas les youplalas qui les étouffaient).

Leur principale occupation dans la vie, c’était faire des procès tout le temps à tout le monde. Alors, moi, je leur disais « Oh, que vous êtes jolis, que vous me semblez beaux » (alors que pas du tout, y sont très moches) pour gagner leur faveur, comme ça y me faisaient pas de procès. Ils aimaient bien aussi dire tout le temps que ce pays était archaïque (ce qui est assez vrai, on peut pas leur enlever leur sens de l'observation, mais dès que je les regardais, je me disais qu’y transpiraient pas vraiment la modernité eux-mêmes…) et aussi regarder par la fenêtre avec des jumelles pour voir si des gens du village faisaient des erreurs juridiques et appeler la mairie pour dire « y’a Mr X qui est en train de faire une erreur juridique ». Freaky.  

Ils sont un peu rustres aussi. L’autre jour, par exemple, Robert a débarqué dans mon jardin avec un sac en plastique en disant « je viens chercher des pommes pour faire une tarte ». J’ai fait « hu, hu, d’accord… » (y vaut mieux pas trop le contredire). Il arrivait pas à les attraper, alors il est rentré chez lui et après il est revenu avec un grand bâton de 2.5 m et il a tapé comme un malade sur mon pommier. Là, j'ai fait « hu hu » (encore) et j'ai dit « merci beaucoup Robert de taper sur mon pommier, c’est très gentil » (j’avais peur qu’il me frappe avec son bâton). En même temps, j’étais très occupé à me gratter le coude pasque j’avais été mangé par un troupeau de pitits zinsectes non identifiés et j’étais salement rouge, avec des plaques de boutons dégueulasses. Et là y m'a dit tout de go «  Raymonde a lu un livre sur les insectes, et t’as probablement été bouffé par une tique et tu peux crever d’une encéphalite ». « Ah d’accord, merci Robert », j’ai dit (il avait toujours son bâton). Après il est parti avec mes pommes sans dire merci, ni au revoir. Mais j’étais encore en vie. Et le lendemain, il m’a offert 256 bulbes de jonquilles… Mais keski voulait qu’je foute avec 256 bulbes ? J’aime pas ça en plus les jonquilles. Bon, c’était quand même sympa, on va pas critiquer, et puis je préfèrais définitivement être de leur côté que faire partie de leurs ennemis. En plus, Robert, il est venu me voir l’autre jour avec un air minab’ pour que je lui tape son CV et que je l’imprime. Depuis, je le tutoie et on va aux putes ensemble. Bref, la vraie entente entre voisins comme on l’aime (mais je restais quand même sur mes gardes : ça faisait quatre jours que j’avais pas vu Raymonde. Avec la chance que j’avais, il l’avait butée à grand renfort de machette et elle pendouillait à un crochet de boucher dans sa grange) !

Par ailleurs, et sans lien direct avec les voisins précédents, mon village était envahi par des chats sauvages dont la prolifération systémique était entretenue par un de mes voisins (l’affreux Monsieur Pivert, prof d’espagnol, qui a une peur panique des frelons) qui les nourrit en disant « y sont kro mignons ». Kro mignons mon cul. J’y pisse à la raie à Monsieur Pivert. En plus j’ai jamais pu blairer les chats. Y z’arrêtaient pas de gratter mon gazon et de sortir des fourrés quand on s’y attendait le moins (enculés de chats). Alors pour montrer fermement ma désapprobation, j’ai disséminé joyeusement des pièges à loup rouillés avec du tétanos dessus partout dans mon jardin (et surtout dans les fourrés). Si ça marchait pour les loups, ça devait fonctionner aussi pour les chats (y'a pas d'raison, théoriquement). Si quelqu’un veut des pantoufles en chat, just let me know. Et pour Monsieur Pivert, j’ai prévu de lui offrir des frelons pour Noël.

Laissez moi maintenant vous parler de mes pires ennemis : les Flanby’s. Un couple affreux avec des enfants. Une petite quarantaine (c’est leur âge, pas le nombre d’enfants - c’est 2 le nombre d’enfants). Lui, Rodriguo, est constructeur de route, un métier d’homme s’il en est. D’ailleurs, il est un peu gaulé comme un bûcheron canadien, alors lui aussi y faut pas trop l’énerver. Par contre, c’est bizarre, pasque le week-end y se fait bronzer sur une chaise longue avec un mini-short en nylon bleu. En même temps, sa femme, Josette, fait 1 mètre cube et ressemble à un boucher est-allemand (laissez moi vous dire qu’on sait qui porte la culotte dans le couple)… Le passe-temps favori de cette horrible famille est de vivre en autarcie (bien beau passe-temps s’il en est). Ils construisent des murs toute la journée pour être isolés de tout le monde. Aussi y viennent me voir sur la pointe des pieds et y disent : « bonjour Thomas, ta haie elle est à 49.9 cm de chez nous alors que ça devrait être à 50 cm… (on a mesuré) et donc tu pourrais la dépiquer (on parle de lauriers cerises de 3.5 m de haut… avec des racines de 3 km) et l’écarter de 0.1 cm pour être en conformité avec la loi »… « Bah ouais, ça tombe bien, j’ai que ça à foutre ! » (ceci dit, dans les faits, j’ai pas grand-chose d’autre à foutre, mais bon, ça a l’air sacrément chiant comme travail)… 3615 demain j’appelle Julien Courbet de chez « sans aucun doute », c’est décidé. Ou sinon y me reste deux-trois pièges à loup rouillés… Ce qui est pénible surtout, c’est leur motivation. Quand je leur demande si mes arbres les gênent pour la lumière, y me répondent « non, pas du tout ». Quand je leur demande si mes arbres les gênent parce qu’ils perdent leurs feuilles chez eux, y me répondent « non, pas du tout ». Alors quand je leur demande pourquoi il faut que je coupe mes arbres et qu’ils me répondent « parce que c’est la loi », vous comprendrez que j’ai un tout petit peu envie de les faire buter par un commando punitif et anonyme de ninjas surentraînés (en précisant bien aux ninjas de prendre leur temps et de les faire atrocement souffrir). Je reste relativement désappointé face à tant de connerie gratuite.

Toujours dans le registre « fais connaissance avec tes gentils voisins », il y a une meute d’affreux ouvriers qui squatte en face de chez moi pour reconstruire une maison. Ca fait 5 mois qu’y sont dessus et ça avance pas des masses cette connerie… Ils sont vraiment infâmes et ne connaissent que deux expressions : « Bah ouais » et « Bah nan ». Ce qui permet de grandes conversations complexes et enlevées, je ne vous le cache pas. Normalement, ils sont justes odieux, du genre, tu leur dis bonjour, y se retournent, te regardent, te répondent pas et se remettent à bosser en parlant fort et en faisant des blagues grasses (« c’est l’histoire d’une pute… »). Seule phrase semi-évoluée qu’y m’ont sortie depuis le début, c’est quand je faisais un tour de la maison l’autre jour. Ils m’ont dit : « Alors, ça se promène ? ». Phrase mythique à laquelle j’ai répondu (attention, réponse mythique) : « Et oui ! ça se promène ! ». Putain, bonjour l’adaptation sociale. Bref, j’en ferai jamais mes meilleurs potes. Et j’ai très hâte que ça se termine cette connerie… mais comme c’est pas du tout fini et qu’ils ont déjà presque une année de retard, l’espoir d’une fin prochaine n’est pas vraiment de mise.

Voilà pour les méchants voisins (c’est déjà pas mal). Pour les gentils voisins, RDV au prochain post.
D’ici là, portez vous bien les gens, T.

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